Le 1er mai, des origines à nos jours : un siècle et demi de luttes pour le progrès social

1884 : les origines du 1er Mai

Au cours du IVe congrès de l’American Fédération of Labor, en 1884, les principaux syndicats ouvriers des Etats-Unis s’étaient donnés deux ans pour imposer aux patrons une limitation de la journée de travail à huit heures.

Ils avaient choisi de débuter leur action un 1er mai parce que beaucoup d’entreprises américaines entamaient ce jour-là leur année comptable.

Arrive le 1er mai 1886. Beaucoup de travailleurs obtiennent immédiatement satisfaction de leur employeur. Mais d’autres, moins chanceux, au nombre d’environ 340 000, doivent faire grève pour forcer leur employeur à céder. Le 3 mai, une manifestation fait trois morts parmi les grévistes de la société Mc Cormick Harvester, à Chicago.

 

Une marche de protestation a lieu le lendemain et dans la soirée, tandis que la manifestation se disperse à Haymarket Square, il ne reste plus que 200 manifestants face à autant de policiers.

C’est alors qu’une bombe explose devant les forces de l’ordre. Elle fait une quinzaine de morts dans les rangs de la police. Trois syndicalistes anarchistes sont jugés et condamnés à la prison à perpétuité. Cinq autres sont pendus le 11 novembre 1886 malgré des preuves incertaines.

En 1889, la II° Internationale se réunit à Paris pour le centenaire de la Révolution française et décide de faire du Premier mai une journée de lutte et de solidarité dans tous les pays en avançant la revendication des 8h, soit 48h par semaine puisque le dimanche est le seul jour chômé.

 

Le massacre de Fourmies – Premier mai 1891

Fourmies est une petite ville du Nord de la France, spécialisée dans l’industrie textile.

Les Délégués ouvriers désignés en Assemblée générale des Travailleurs et réunis à Fourmies, au Café du Cygne, avaient retenu 8 revendications prioritaires dont la journée de huit heures, la création d’une Bourse du Travail et la création d’une caisse de retraites.

Histoire de dissuader les ouvriers de se mettre en grève, le patronat menace également de licencier tous les ouvriers qui arrêteront le travail. Devant les risques de débordements, ils finissent par obtenir du préfet, qu’il mobilise un important dispositif de maintien de l’ordre. 2 compagnies d’infanterie sont donc mobilisées.

A 9 heures, la plupart des ouvriers de la ville sont en grève, et une seule filature reste en activité. Des ouvriers grévistes s’en approchent afin d’obliger « les jaunes » à cesser le travail.

Après une échauffourée avec les gendarmes à cheval, 4 manifestants sont arrêtés.

Le premier slogan de la journée « c’est les huit heures qu’il nous faut  » est alors devenu « c’est nos hommes qu’il nous faut « . Le reste de la journée se déroule sans aucun incident majeur.

En début d’après-midi, le Maire de Fourmies promet de relâcher à 17h00 les ouvriers qui avaient été arrêtés le matin. Il est 18h15, les 4 grévistes emprisonnés à la Mairie n’ont toujours pas été libérés. Près de 200 manifestants arrivent alors sur la place de l’église et font face aux 300 soldats équipés du nouveau fusil Lebel. Les balles peuvent, quand la distance n’excède pas 100  mètres, traverser trois corps humains sans perdre d’efficacité. Il est 18h20, les cailloux volent, la foule pousse.

Pour se libérer, le commandant Chapus fait tirer en l’air. Rien ne change. Il crie :  » Feu ! Feu ! Feu rapide ! Visez le porte-drapeau !  » qui lui s’était avancé.

La fusillade va faire une trentaine de blessés et neuf morts parmi lesquels Maria BLONDEAU, jeune ouvrière de 18 ans, Kléber GILOTEAUX, un jeune conscrit de 21 ans et Emile CORNAILLE, enfant de 11 ans.

Ces morts, promus martyrs aux yeux des ouvriers, vont très vite devenir un symbole de la République répressive et de classe.  » Car à Fourmies, c’est sur une gamine que le Lebel fit son premier essai … » (Montéhus).

Les 10 fusillés de Fourmies sont inhumés le 4 mai devant une foule estimée à près de 30 000 personnes.

A partir de cette date et de ce souvenir sanglant, les manifestants accrochent une églantine rouge à leur boutonnière. Le brin de muguet ne fait son apparition qu’en 1907.


 
1941  :  La seconde guerre mondiale, les années sombres

En 1941, les syndicats ont été dissous par le régime de Vichy et la CGT est clandestine.

Le 24 avril 1941, le Maréchal Pétain instaure officiellement par la loi Belin le 1er mai comme « la fête du Travail et de la Concorde sociale », appliquant ainsi la devise Travail, Famille, Patrie.
Par son refus à la fois du capitalisme et du socialisme, le régime pétainiste recherche une troisième voie fondée sur le corporatisme, débaptisant « la fête des travailleurs » qui faisait trop référence à la lutte des classes.
À l’initiative de René Belin, ancien dirigeant de l’aile anticommuniste de la CGT, devenu secrétaire d’État au travail dans le Gouvernement de François Darlan, le jour devient férié, chômé et payé.
La complicité active de l’Eglise catholique fait du Premier Mai la Saint Philippe (aujourd’hui le 3 Mai).
L’extrême droite avait récupéré Jeanne d’ARC, elle s’approprie désormais la journée des travailleurs.

 

 

2015 : Le monde du travail uni ?

A partir du premier mai 1947, le Premier Mai est chômé et payé, l’expression Fête du Travail réminiscence pétainiste n’apparait qu’en 1948, au début de la guerre froide, et ce n’est bien évidemment pas un hasard.

Les manifestations du Premier Mai sont fréquemment interdites pour éviter l’expression d’une solidarité avec les peuples colonisés en lutte pour leur indépendance.

Aujourd’hui, le Premier mai reste un symbole fort et il faut maintenir et amplifier les valeurs qu’il met en avant : solidarité, internationalisme, syndicalisme de classe, affirmation de revendications. Préférons le rouge de l’églantine au blanc du muguet ! Sachons aussi démasquer les enfants de Pétain qui s’approprient sans vergogne cette journée qui n’est pas à eux !

 
 

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